mardi 12 octobre 2010

Motivé...ou presque...

Une fois encore les salariés vont payer les pots cassés de la crise. Comme d'habitude pourrait-on dire. Elle aura eu au moins le mérite de révéler les travers que suivent les entreprises du point de vue de la gestion du personnel. Comme nous le révèle ce grand dossier publié sur le blog Economique et Social, le salarié va continuer d'être sa variable d'ajustement. Et cette variable va toujours dans le même sens : celui de la réduction du personnel. Les entreprises ne prennent plus de gants pour imposer désormais leur vision des choses. "Alors qu'elles font des bénéfices, elles décident de supprimer discrètement des emplois en proposant aux mêmes personnes de se mettre en auto-entrepreneur. C'est une filouterie juteuse pour bon nombre d'entreprises, qui profitent de la flexibilité des auto-entrepreneurs (qui ne coûtent rien en cas de chute d'activité), mais également de leurs tarifs avantageux (les charges et impôts faibles associés à ce statut en font des 'entreprises' compétitives). Tout le risque est pris par l'auto-entrepreneur. C'est à croire que le gouvernement a crée volontairement ce statut à la demande des employeurs". Partout, les employés sont virés, stressés, harcelés et exploités. Prenons l'exemple de Kerviel. Certes, il a fauté mais à la demande de qui ? De sa hiérarchie (elle a d'ailleurs été totalement remplacée suite à ce scandale). C'est en fait un cas d'école : mettre la pression sur les salariés afin qu'ils trouvent des solutions mêmes illégales permettant de satisfaire les demandes de la hiérarchie. Pratique, sans risque et efficace... De plus, les salariés sont manipulés. A la sauce japonaise. La hiérarchie organise un "brain storming" géant (cogitation par petits groupes) dans lequel on demande aux salariés leurs solutions pour diminuer tous les coûts de l'entreprise. Toutes les idées sont les bienvenues : de la plus ridicule en apparence à la plus sophistiquée. Chacun y va de sa contribution. Beaucoup tournent autour des services généraux (utiliser des photocopies recto-verso par exemple), d'autres concernent l'optimisation (supprimer tel ou tel service non rentable). Les salariés acceptent ensuite d'autant plus facilement les modifications car ils ont le sentiment qu'elles viennent d'eux sachant que ces modifications prennent le soin de ne pas toucher ceux qui les mettent en oeuvre. Elles sont mêmes renforcées car en temps de crise, ce "brain storming" vient souvent après l'annonce d'un plan social. L'entreprise doit licencier sauf si elle arrive à faire des économies. Cependant, à force d'être manipulé, l'employé devient conscient qu'on lui demande toujours plus pour un gain toujours plus faible. Que penser des concours de vente chez les télés-conseillers ? Tout le monde court pour ne payer (maigrement) au final une seule personne : le gagnant ! Les autres sont mêmes montrés du doigt. Nous sommes dans un monde où l'entreprise écrase les forts et broie les plus faibles sans jamais prendre ses responsabilités. Pour y parvenir, elle ne recrute que des moutons, des éléments dociles ou parfois féroces. Lors des entretiens d'embauche, ce sont souvent ces caractéristiques qui priment plutôt que la compétence ou le potentiel du candidat. Si le salarié est docile, il fera ce qu'on lui demande sans rien dire ; s'il est féroce, il fera volontiers les actions immorales et inhumaines. C'est un peu le sens du documentaire : "la mise à mort du travail". Penser comme la direction est la seule issue de l'employé moderne. Tout refus ou mauvaise volonté se solde par un licenciement ou un "placard". Il faut tout accepter y compris les décisions les plus idiotes parce qu'elles viennent d'une personne à qui ont fait déférence. Du coup, l'intelligence humaine est mise à contribution pour contourner les règles. La valeur du travail s'en trouve fortement diminuée ; celui qui l'accomplit aussi. De la même façon, l'isolement de l'employé est primordial. Ainsi les "open spaces" sont idéaux pour que les employés puissent se comparer. Celui qui ne se donne pas complètement pour sa boîte est vite repéré. Et diffamé. L'employé devient le pire ennemi de l'employé. La réduction des espaces collectifs fait partie de cette stratégie. Or l'homme est comme une machine. Si elle ne bénéficie pas d'une maintenance, elle s'enraye et s'arrête. L'entreprise moderne est donc un endroit peuplé de loups souvent incapables. Les embauchés peu dociles sont écartés des promotions et harcelés par ces mêmes loups. On fait tout pour se séparer des personnes ayant des affinités avec des gens syndiqués. Une fois le tri réalisé, il n'est pas rare de voir les loups se manger entre-eux. En fait il faut dire que depuis 1980, les gouvernements ont peur du plein emploi. Certains pensaient qu'il fallait un chômage massif pour peser sur les salaires. A cela s'ajouter une forte promotion du crédit à la consommation et de la famille. Du coup le piège est inévitable. Un salarié ayant un crédit à la consommation, un crédit immobilier et un souci de protéger sa famille devient obligatoirement un mouton docile. Petit détail amusant : la bulle immobilière a fait que les gens se sont vus proposés des crédits immobiliers à échéance de 30 ans alors que dans le même temps, les employés qu'ils sont appartiennent à une entreprise qui a une vision au mieux à 12 mois. Cherchez l'erreur. Que reste t-il de l'employé moderne ? Rien ou si peu de chose. L'homme qui a peur se corrompt facilement et si la peur est forte, la morale et l'intégrité passent après. Autant faire ce qu'il faut pour ne plus être dépendant de ce système qui étouffe la plupart d'entre nous : faire le moins possible de crédits, rester locataire, partir d'une entreprise dès que son intégrité est menacée, faire de la résistance passive, être prudent et impliquer nos dirigeants, éviter les manipulations ("brain storming" et concours bidons), de venir entrepreneur (et pas faux auto-entrepreneur), jouer au parfait loup/mouton dans les entretiens (même si on ne l'est pas du tout), ne rien attendre de l'entreprise (cela évite la déception), et faire monter au maximum les enchères lorsqu'on est (les rares fois) en position de force. Il faut aussi accepter notre condition de fusible (c'est éliminer la peur dont l'entreprise est si friande), ne pas faire de zèle (cela ne sert à rien) et développer un cercle de collègues/amis. Si une majorité d'entre nous appliquaient tout ou partie de ces conseils, le contexte pour tous en serait fort différent...







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